Le monde des sports mécaniques est en deuil. Le journalisme est touché en plein coeur. Var Matin est sous le choc. D’autres titres, d’autres confrères aussi.
René Martorell nous a quittés. Discrètement comme la belle personne qu’il était. Dans le calme qui le caractérisait, lui, l’homme de la fureur des circuits, le témoin de tous les risques.
René, c’était le compagnon parfait. Dans l’ébullition d’une rédaction, au milieu d’égos surdimensionnés, il observait le « cirque », les coups d’éclat et ne se fâchait jamais. Derrière ses yeux ronds devant les tempêtes, il avait le recul d’un sage. Et le verbe toujours juste. Le mot bien pesé. La parole libre.
Il regardait la vie passer avec énormément de recul et beaucoup de finesse.
René c’était une référence dans sa spécialité. Il avait son rond de serviette au Paul-Ricard et dans bien d’autres circuits ou rallyes. Il n’avait pas besoin de prendre rendez-vous ou de passer par un attaché de presse pour rencontrer les as du volant et du guidon. Il était apprécié et faisait partie de la famille. Il avait leur confiance et les champions savaient qu’il ne le trahirait pas tout en restant critique et objectif.
Il était partout chez lui. A Aix, à Marseille, à Toulon, à Nice , à Monaco et dans de nombreux coins de France, jamais il n’était seul. Personne ne lui tournait le dos.
Le football et le rugby toulonnais le faisaient sourire de leurs exagérations.
Le vélo lui était plus familier et il n’hésitait pas à prendre le relais de notre complice Bernard Romest qui avait du mal à s’éloigner de la rédaction, les années passant.
Suivant un Tour de France, dans les Pyrénées, passant dans le village de Mérens-les-Vals en haute Ariège, il avait laissé sa plume divaguer, coincé loin des roues des forçats de la route : « Petit, rustique, gentil, le cheval, écrivait-il dans un joli clin d’oeil. Le nôtre ? Il aime monter sur ses grands chevaux… Sa plume n’est pas toujours gentille. Ses escalades se font vers les sommets de l’investigation et de l’enthousiasme selon le sujet à traiter. Là, il galope… »
Des instants de complicité, de partage, d’amitié.
Un seul moment a été particulièrement douloureux : la fin de l’aventure, un jour de fusion entre Nice Matin et Var Matin, en 1998. Les nouveaux « dirigeants » n’avaient pas eu l’élégance de le conserver dans sa passion préférée, lui proposant une agence ou… la porte ! Pour faire de la place à quelques « affamés » de pouvoir prêts à tout pour occuper la place. Certains, ils se reconnaîtront, ne l’ont pas emporté au paradis. René, choqué, traumatisé, dévasté a laissé quelques larmes sur le parking d’Ollioules. Il est parti sans un mot, sans rancune. Comme un homme élégant et brillant.
Avant de tourner la page et se lancer dans d’autres aventures. Droit dans ses valeurs, fidèle dans ses amitiés.
Un grand Monsieur est parti rejoindre d’autres champions dont il parlait si bien.
Adieu René.
Yves Mérens